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Philip ROTH – La bête qui meurt
Quoi de plus roboratif pour commencer que cette gifle qui vous assène que tout endormissement est prématuré ? Qu’il faut vivre, vivre librement et que l’égoïsme est sain. Dans un style limpide, percutant, juste, et juste ce que l’âge permet de froid et d’impérieux, David Kepesh, vieux sempervirens, est bien placé pour vous le dire : la soixantaine qui se tasse, cet universitaire, critique d’art, toujours curieux de la vie, développe la conception qu’il en a : fi des carcans du mariage et de la famille qu’il a fuis, il vit des rencontres stimulantes, non encadrées socialement, et où la sexualité est le sel premier.
Pourtant, dans les rouages de ses discours libertaires, on entend crisser le grain de sable : la jalousie. Consuela, une jeune Cubaine, l’obsèdera pendant trois années jusqu’à le dévisser de lui-même. Cinq années plus tard, Consuela se saura atteinte d’une maladie mortelle.
Parallèle de deux rythmes, de deux courses vers la mort. Mort lente et conventionnelle de l’un (la vieillesse), mort scandaleuse de l’autre : c’est elle, Consuela, qui, quoique de trente-huit ans sa cadette, ira affronter la mort au plus près. Un peu comme si, par couardise jusqu’au bout, il l’y envoyait en délégation.
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