Ni apeurés, ni même onfrayés !
"Le travail du journaliste est de commenter ce qui advient, celui du philosophe de mettre en perspective ce qui est avec les conditions qui ont rendu possible ce qui advient."
M. Onfray (à propos des attentats du 13 novembre à Paris).
Chaque époque a les philosophes qu’elle mérite.
Mais Onfray, le philosophe qui, à bien y regarder, n’en a jamais eu que le nom, est en réalité un historiographe et professeur de philosophie : comme les professeurs de philosophie, il sait commenter l’œuvre des philosophes qui l’ont précédé, mais n’a produit lui-même aucun concept, aucun système nouveaux...
Sa citation confirme sa confusion : « mettre en perspective.. », ce n’est pas un travail de philosophe, quoi qu’il en dise, mais un travail d’historien.
Celui du philosophe consiste plutôt à intégrer le maximum de faits dans un ensemble dialectique (d’argumentation), afin de produire un espace cohérent le plus vaste possible, les aspects diachronique et étiologique n’étant guère que deux dimensions de cet espace.
Le maximum de faits, et non pas seulement ceux qui servent la vision partielle et idéologique qu’on voudrait faire passer pour philosophique.
Parce que, plus il y a de faits articulés dans une argumentation et moins celle-ci présente le risque de n'être qu'une opinion.
C’est évidemment infiniment plus complexe que de blablater en donnant dans l’auto-encensement devant le premier journaliste venu.
Le moins qu’on puisse dire, c’est qu’Onfray peine à la cohérence et à la synthèse. Mais, concédons le lui, on ne peut être au four et au moulin : à la fois figure médiatique tous azimuts, et penseur pertinent.
La démarche philosophique est cousine de la démarche scientifique. Ou devrait l’être aujourd’hui : nous ne sommes plus à l’époque ou un Descartes, sous sa cape de philosophe, pouvait se permettre les âneries que contient son « Discours de la méthode » (cf. son explication du mécanisme cardiaque et de la circulation sanguine).
27 novembre 2015
Post Scriptum
Comment, sans être pris de nausée, assister au spectacle du « philosophe » Onfray se tordant dans ses contradictions et sa couardise ?
Comment encore accorder du crédit aux propos de ce cuistre dont l’insincérité pue désormais à plein nez (seule question philosophique qui le taraude sincèrement chaque matin : « comment faire parler de moi, autrement dit, d’où souffle le vent aujourd’hui ? ») ?
Comment, sans rire, l’entendre pérorer sur « l’islam politique », c’est-à-dire, à l’euphémisme près, le djihadisme ? Car, que je sache, ce ne sont pas l’Arabie Saoudite, le Yémen, Oman, l’Iran, la Malaisie, ni même le Pakistan qui sont bombardés, quoique tous pays musulmans. Lui qui, camusien un temps, a dû oublier cette phrase du grand Albert : « Mal nommer les choses, c’est accroître le malheur du monde », gageons qu’en 1933, au lieu de nazisme, il eût parlé d’aryanisme politique !
Enfin, que n’a-t-il rejoint ces forêts, du recours auxquelles, dans un livre*, il caressait le projet, il n’y a pas si longtemps ?
* « Le Recours aux forêts La tentation de Démocrite » (Ed. Galilée), titre déjà pris, du reste, par Ernst Jünger.
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