Seules les bonnes feuilles tombent en automne (?)
Oui, je vous l’accorde, ça sonne comme un de ces titres fleuves qui ont le vent en poupe depuis quelques années, gonflés d’assez de vent en effet pour finir dans une mer de stérilité.
M’enfin tout de même, je m’interroge : en quoi l’argument « Rentrée littéraire », lu un peu partout en cette saison sur les bandeaux destinés aux badauds blasés, peut-il
m’affriander en tant que lecteur ? Quelle qualité implicite suis-je censé déceler dans cette mention ? Y-a-t-il autre chose qu’un hasard éditorial dans le fait qu’un livre soit publié, disons,
entre août et octobre de chaque année ? Dois-je comprendre que, mon âge scolaire se perpétuant jusqu’à une retraite bien méritée (et encore ! les retraités heureux lisent aussi et boivent du café),
je serais tenu de charger mon cartable de tous ces livres certifiés « Rentrée littéraire » ? Dans ce cas, pourquoi l’année littéraire est-elle si courte puisque, entre la rentrée et la remise des prix, ne se seront écoulés au mieux que quatre mois ?
L’on se doute, cessant toute naïveté, qu’un phénomène aussi itéré répond à quelque calcul : il semble en effet que les grands prix littéraires sont systématiquement décernés aux livres mis sur orbite dans cette fenêtre août-octobre. Or, si seul le critère
de saison présidait à l’attribution des prix, la valeur de prescription de ceux-ci serait encore plus largement entamée qu’elle ne l’est déjà. Donc une seule explication de cette concomitance saison/prix : toute l’année, les éditeurs gardent sous le coude la
crème présumée de la littérature pour ne la publier qu’à la rentrée.
Mais alors on se demande pourquoi, plutôt que de publier à un rythme à peu près constant tout au long de l’année, préférer une telle politique de gavage, de goulot d’étranglement ; et l’on imagine ses ravages sur un public de qui la sur-offre temporaire pourrait bien lasser tous les appétits, en leur substituant une persistante nausée.
Une courte vidéo, pour finir
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